LES PLANTES

Il est temps d'explorer

L’art de la coopération avec le reste du vivant chez les plantes : le cas des symbioses

🌱 Aviez-vous déjà imaginé que les plantes, elles aussi, sont capables de coopérer avec le reste du vivant ? Comment définit-on ces coopérations vitales que sont les symbioses ? Quels en sont les exemples chez les plantes ? 🤝

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8/26/20249 min read

💡Il nous a semblé intéressant de traiter dans cet épisode de la question des coopérations étroites et parfois complexes que peuvent être les symbioses entre les plantes et d’autres organismes vivants : des bactéries aux animaux en passant par les champignons.

🤔 Nous allons donc éplucher ce que veut dire le terme symbiose en biologie et en particulier dans le monde du végétal et citer quelques exemples assez bien connus, intéressants et inspirants !

L’étymologie du mot symbiose est vraiment parlante puisqu’elle vient du mot grec sumbiōsis qui veut dire “vie en commun” provenant lui-même du terme sunbióô soit “vivre ensemble”. Vous le comprenez maintenant, la symbiose, en biologie se définit par une relation indissoluble et durable entre deux espèces dont chacune tire bénéfice. Elle est donc vitale pour l’une et l'autre des espèces qui ne peuvent exister à elle seule.
Cette définition est valable surtout dans la langue française puisque les anglophones ne donnent pas exactement la même définition au terme “symbiose” qu’ils caractérisent plutôt comme une association obligatoire effectivement sans la notion de bénéfice réciproque.

Cette description qui a définit un peu le début des recherches sur les relations entre êtres vivants semble placer la relation de parasitisme comme la référence des relations entre espèces dans le vivant en comparaison avec par la suite, la symbiose, le mutualisme …et

Il semble donc que Anton de Bary soit à l’origine de la définition large de la symbiose comprenant finalement le parasitisme dans le cadre très large de l’association symbiotique.

Franchement cette histoire de la découverte des relations symbiose / parasitisme est passionnante, on vous mettra les liens vers les articles sur notre site web si vous souhaitez creuser.

Ici nous allons vous parler de symbiose au sens francophone soit, des relations obligatoires (parfois facultatives nous le verrons) et bénéfiques pour chaque espèce participante (au sens mutualisme) et donc nous mettons de côté le parasitisme et les autres types de relations que nous traiterons dans d’autres épisodes.

En réalité, dans la relation symbiotique, il existe des symbioses obligatoires et d’autres facultatives. Chaque partenaire est appelé symbiotes ou symbiontes sachant que l’hôte est considéré comme le plus gros des deux.

Nous allons rentrer un peu plus dans le détail de ces coopérations entre végétaux et autres organismes vivants au sens de la symbiose qui, souvent, est assez spécifique.

Le cas des mycorhizes :

Il y a aussi les mycorhizes : c’est une symbiose entre un champignon (en grec mukês) et les racines (rhiza) d’une plante. Où le champignons va se connecter aux racines de la plantes et créer un réseau autour. Les champignons vont bénéficier des sucres produit par la plante grâce à la photosynthèse et vont permettre en retour à la plante d’aller plus loins dans les sols, comme une sorte de prolongation grâce aux hyphes de champignons et donc de favoriser l’absorption d’éléments nutritifs (azote, phosphore, eau).

Ils offrent par la même occasion un rempart contre les polluants du sols à la plante.

Le cas spécifique des orchidées et champignons :

Un autre exemple de symbiose que j’aime beaucoup c’est celui des orchidées. Les graines d’orchidées n’ont pas de réserve (amidon) contrairement aux autres graines. Et donc, elles ne peuvent pas germer même en présence d’eau puisqu’elles n’ont pas l’énergie nécessaire pour cela. Pour arriver à germer, elles s’associent donc à une espèce de champignon spécifique (Rhizoctonia) qui va leur fournir l’énergie nécessaire à leur germination. Plus tard, quand l’orchidée est adulte, elle devient verte donc photosynthétique mais elle poursuit son association avec un champignon en lui fournissant les sucres issus de la photosynthèse alors que le champignon continue de lui apporter eau et sels minéraux.

Il se trouve que certaines orchidées restent non photosynthétiques adultes et sont donc complètement dépendantes du champignon.


Pour en savoir plus :

Anton de Bary à gauche et avec ses étudiants à droite (source : Wikimedia)

Exemple de lichens (source : Wikimedia)

Relation symbiotique shématisée. (source : Wikimedia)

Nodosité sur une racine (source : Wikimedia)

ÉTYMOLOGIE

Ce qui veut dire que le parasitisme, qui est une relation obligatoire mais dont l’une des espèces, à priori, pâtit de la présence de l’autre qui elle a besoin de son hôte pour survivre, est considéré comme une relation symbiotique. Probablement que nous consacrerons un épisode à cette notion de parasitisme qui mérite un peu plus de rentrer dans le détail. La notion de bénéfice réciproque est amenée par le terme de mutualisme et donc on pourrait traduire la définition “symbiose” française par “mutualisme symbiotique” dans le jargon anglais.


Genèse  

Cette notion de symbiose est observée en premier lieu en 1825 par le botaniste allemand Karl Wallroth qui observe des structures proches de celles des microalgues .Puis en 1866, un autre microbiologiste allemand, Anton de Bary, a parlé d’une “règle de vie commune à de nombreuses espèces vivantes”. Et puis en 1867, le botaniste suisse Simon Schwendener observe au microscope la croissance du lichen et découvre qu’un champignon se développe en même temps que des microalgues et là il va plutôt parler de parasitisme de l’algue par le champignon. Et puis finalement on suppose que Albert-Bernhardt Frank et Anton de Bary, justement, seront les premiers à parler de “symbiose” en ces termes. On reviendra plus tard sur le lichen pour comprendre sa structure un peu plus précisément.


PARLONS DONC SYMBIOSES

Le cas des lichens :

Nous avons parlé de lichen il y a quelques minutes, et bien les lichens, se sont ces organismes qui ressemblent à des champignons jaunâtres ou bleuâtres sur les troncs d’arbres ou sur les murets. Vous en avez forcément déjà vu. Ils ont fait l’objet de nombreuses études au 19e siècle comme on l’a évoqué, mais encore aujourd’hui les études se poursuivent. Ils se révèlent être des relations indissociables entre un champignon et parfois de multiples partenaires qui peuvent être des virus, des bactéries ou des levures.

Mais également, certains lichens sont formés en majorité d’une algue (c’est là qu’intervient le monde des plantes !) qui héberge un champignon et là on lui donne le petit nom de mycophycobiose.

A ce jour, on sait que les lichens regroupent :

  • dans 85 % des cas, une (ou des) algue(s) associée(s) à un ou plusieurs champignons ;

  • dans 10 % des cas, une cyanobactérie associée à un champignon ;

  • dans 5 % des cas, les 3 types de partenaires sont associés

Dans ces associations, il y a le mycobionte (le champignon) qui offre support, protection, sels minéraux et l’eau quand le chlorobionte, lui, offre les réservent énergétiques du type amidon ou lipide obtenus grâce à la photosynthèse.

Voilà pour cette première association qui en cache en réalité de nombreuses car la lichénologie est un champ de recherche très vaste et assez complexe finalement mais passionnant !

Le cas des nodosités :

Certaines plantes vivent également en association avec des bactéries (nous avons évoqué ces associations d’ailleurs dans l’épisode avec Alia Dellagi sur les microorganismes et les plantes). Dans cette association, se sont des bactéries du genre Rhizobium, en général, qui vont s’associer avec une plante de la famille des Fabacées (colza, soja, trèfle…) mais aussi parfois d’autres familles comme les rosacées. Dans la plupart des cas, cela va entraîner la formation de nodules au niveau des racines (parfois des tiges d’ailleurs) , c’est à dire que la bactérie va induire la déformation des poils absorbants des racines en des petites boules qui vont abriter ces bactéries mais qui seront irrigués par les vaisseaux de la plante.

Dans cette association facultative, les plantes sécrètent des molécules spécifiques , les flavonoïdes, que les bactéries vont identifier comme de la bonne famille de plantes et vont infecter celle-ci. Ces molécules vont alors interagir avec des facteurs produits par la bactérie, qu’on appelle facteur nod pour nodulation (petite boule) et qui vont amplifier la production de ces facteurs eux mêmes pour produire ces nodulations.

Dans cette symbiose, les bactéries ont le gîte et le couvert puisqu’elles profitent des composés carbonées issus de la photosynthèse de la plante et la plante à son tour va elle profiter de la capacité de ces bactéries à assimiler l’azote atmosphérique dont elles ont besoin pour pousser.

On dit donc que cette association est facultative mais lorsqu’elle a lieu, la plante pousse plus efficacement et est moins sujette aux maladies.

Le cas d’Azolla :

Il existe aussi une plante qui est une fougère nommée Azolla, sorte de fougère aquatique, qui est associée en symbiose avec une cyanobactérie (bactérie photosynthétique) capable de fixer elle aussi l’azote atmosphérique et donc en faire profiter la fougère. Elle est d’ailleurs utilisée depuis des siècles comme fertilisant dans les rizières en Chine.


Fougère aquatique Azolla (source : Wikimedia)

Le cas des endosymbioses :

On avait également envie d’évoquer avec vous la théorie de l’endosymbiose. Kezako ? Et bien cette théorie, est l'hypothèse selon laquelle les structures qui produisent de l’énergie chez les cellules eucaryotes (cellule avec un noyau, donc comme les nôtres (en opposition aux bactéries)) sont en fait la résultante d’une symbiose entre une bactérie et une cellule à noyau donnant lieu à une cellule à noyau avec mitochondrie (encore une fois les nôtres). Cette endosymbiose s’est maintenue dans le temps et est maintenant perpétuelle.

Mais par la suite, certaines de ces cellules ont “subi” une deuxième symbiose avec une bactérie photosynthétique donnant lieu à une cellule avec mitochondrie et plaste (chloroplaste dans le cas de la lignée verte des plantae). Deuxième symbiose (endo symbiose) qui s’est également maintenue dans le temps.

Représentation de l'endosymbiose secondaire des chloroplastes. (source : Wikimedia)

Le cas de la limace de mer Elysia Chlorotica :

Un autre cas intéressant de symbiose avec les plantes est celui de la limace de mer Elysia Chlorotica, aussi appelée Elyse émeraude avec une algue. Cette limace est … verte (en général), il a été dit que c’était le premier animal à réaliser la photosynthèse : mais alors est ce que c’est possible ça ?

Au départ, ce n’est pas directement la limace qui réalise la photosynthèse. En effet, au début de son cycle de vie, la limace de mer va se nourrir de l’algue sur laquelle elle naît, qui s'appelle Vaucheria litorea, et cette limace à force de se nourrir devient progressivement verte. L’algue sera digéré mais va rester à l’intérieur de l’intestin de la limace, ce qui permet aux végétaux de faire la photosynthèse : les chloroplastes, ce sont eux qui à l’intérieur de chacune des cellules végétale, produise l’énergie photosynthétique.

La limace va garder ces chloroplaste et va donc grâce à eux faire la photosynthèse : on appelle cette forme de symbiose la kleptoplastie.


Elysia Chlorotica sous toutes ses coutures (source : Wikimedia)

Les symbioses dans le vivant sont un cas de coopération fascinant et complexe. Et cela met une fois de plus en évidence que les plantes sont des organismes qui communiquent et interagissent avec ce qui les entoures et on le voit un peu plus à chacun de nos épisodes.