LES PLANTES

Il est temps d'explorer

Immersion dans la diversité des plantes aquatiques

Envie d’un bain de science ? Plongez avec nous à la découverte des plantes aquatiques, ces espèces étonnantes qui vivent les racines dans l’eau douce ou salée. Quelles sont-elles ? Quelles adaptations ont-elles développées ? Et comment le changement climatique menace-t-il ces milieux sensibles ?

PODCASTDOCUMENTAIRE

6/25/202510 min read

Quelles sont ces plantes qui vivent dans les milieux aquatiques ?
Qu’ont-elles de si particulier ? Où les trouve-t-on ?
Quel impact peut avoir le changement climatique sur ces plantes sensibles à leur environnement ?

Guidées par les chroniques passionnantes des étudiant·es du Master 2 “Risques et environnement” de l'université Paris Cité, nous explorons tourbières, récifs, mares et herbiers sous-marins, pour comprendre les enjeux écologiques et les mystères de la vie aquatique végétale

Le mot aquatique vient du latin aquaticus, qui signifie « qui vit dans l’eau », lui-même dérivé de aqua, l’eau. En français, il apparaît dès 1270 avec le sens de « qui est de la nature de l’eau », puis dès le XIVe siècle avec celui de « qui vit dans l’eau ». Une plante aquatique est donc une espèce capable de vivre partiellement ou totalement immergée, que ce soit dans de l’eau douce, ou dans de l’eau salée. Nous avons déjà évoqué les plantes qui vivent dans l’eau dans d’autres épisodes, en particulier les palétuviers des mangroves ou les salicornes.

Pour en savoir plus :

ÉTYMOLOGIE du terme

Parmi les plantes aquatiques les plus fascinantes, certaines ne se contentent pas de vivre dans l’eau : elles façonnent de véritables écosystèmes. C’est le cas des mangroves, ces écosystèmes situées dans les zones tropicales, là où la terre rencontre la mer. Loin d’être de simples curiosités botaniques, les mangroves jouent un rôle écologique majeur. Non seulement elles abritent une biodiversité exceptionnelle, mais elles se révèlent aussi être des alliées de taille face à l’un des plus grands défis de notre époque : le réchauffement climatique. Plongeons aux coeur de ces milieux, qui pourraient bien détenir une partie de la solution avec Pablo Niderkorn ; Charles Guillerot ; Clara Fray-Gallimard ; Ilham Temericht (à écouter directement dans l'épisode). 

L’été approche, et si nous aussi, nous rêvons de plonger dans l’eau, certaines plantes y vivent toute l’année ! Bienvenue dans ce nouvel épisode où nous partons à la découverte des plantes aquatiques : celles qui vivent les racines dans l’eau, qu’elle soit douce ou salée. Nous allons balayer les milieux aquatiques et évoquer les plantes qui s’y trouvent, leurs spécificités et à quel point leur survie dépend du maintien de ces écosystèmes riches.

Une histoire des plantes aquatiques au cours des temps géologiques :

Les plantes aquatiques regroupent, au sens strict de la classification des plantes, trois grands types : les algues vertes, les algues rouges et certaines plantes à fleurs ou angiospermes. La majorité des plantes à fleurs sont en réalité terrestres, c’est le cas de certains arbres, arbustes, les graminées qui forment les pelouses ou prairies et toutes les herbacées à fleurs. Mais certaines sont retournées dans l’eau voire ne s’en sont jamais vraiment affranchi.

Pour mieux comprendre cette évolution, rappelons que les plantes tirent leur origine d’un ancêtre aquatique doté d’une cellule à noyau, capable de photosynthèse, apparu il y a environ 1 à 1, 8 milliard d’années.

Les millions d’années ont passés et on vu apparaître d’autres organismes tels que des algues à plusieurs cellules comme les ulves puis les bryophytes, communément appelées les mousses qui sont encore grandement dépendantes de l’eau pour boucler leur cycle de vie, en particulier lors de la reproduction : lorsque le gamète mâle (eq spermatozoide) doit nager jusqu’à l’ovule. Sans eau, cette étape est tout bonnement impossible. Viennent ensuite les fougères dont les gamètes ont également besoin de l’eau pour se rejoindre. Puis petit à petit, les nouvelles caractéristiques qui apparaissent permettent aux plantes de s’affranchir de la permanence de l’eau.



A small plant sticking out of the water
A small plant sticking out of the water

Arriver à s’ancrer sur terre n’a pas été une mince affaire. Un milliard d’années durant lesquelles a eu lieu une véritable épopée des plantes, voyant apparaître des nouveaux groupes avec des innovations telles que les plantes à fleurs donc , dont les graines sont protégées d’un réceptacle : le fruit. Chez les plantes à fleur, plus besoin d’eau pour se reproduire. Le gamète mâle, c’est à dire le grain de pollen, rejoint l’ovule d’une fleur grâce à un pollinisateur ou grâce au vent.

A noter que les plantes, en moyenne constituées de plus de 90% d’eau, sont quand même clairement dépendantes de l’eau, au moins pour croître.

De nos jours, des représentants de tous ces groupes sont encore présents sur Terre conservant leur dépendance plus ou moins grande au milieu aquatique. Et donc, quand on dit que certaines plantes à fleurs sont retournées dans l’eau, c’est du point de vue des temps géologiques. Ces plantes à fleurs se trouvant dans des environnements remplis d’eau, elles ont évolué vers des formes aquatiques mais sont complètement différentes des algues !

Pour conclure

Les algues coralligènes, quant à elles, forment des structures calcaires dures, presque minérales. Et même parmi les microalgues, les formes vont de petites sphères vertes à des cellules allongées qui nagent grâce à un flagelle, comme les Chlamydomonas. Cette diversité visuelle nous rappelle que ces plantes ont colonisé l’eau sous des formes aussi variées que les environnements qu’elles habitent.

Nous nous arrêtons d’abord dans une tourbière. Saturées en eau, où s’accumule la tourbe, une matière végétale partiellement décomposée, pauvre en oxygène et en nutriments c'est un environnement très contraignant, certaines plantes y ont développé des adaptations remarquables.

C’est le cas par exemple de la carnivorie, ce mode de nutrition où les plantes se nourrissent d’insectes puisque le sol est trop pauvre. Par exemple les utriculaires et les aldrovandra sont deux plantes carnivores aquatiques qui ont des pièges à insectes immergés sous l’eau ! Olivia ALVES, Lea LOYAUTE et Louanne PARIS se sont intéressées à une étude qui décryptent la manière dont les pièges ont évolué dans ces tourbières. ( à écouter dans l'épisode)

Les mangroves, des écosystèmes précieux, véritables puits de carbone et réserve de biodiversité.

Une plante aquatique, évidences et précisions :

Les plantes aquatiques ne sont pas seulement fascinantes par leurs adaptations. Elles jouent un rôle fondamental dans le fonctionnement des écosystèmes. Elles contribuent à l’oxygénation et à l’épuration de l’eau, servent de refuge, de nurserie ou de garde-manger pour une foule d’animaux aquatiques, du têtard au brochet.

Certaines, comme les zostères ou les posidonies, participent aussi au stockage du carbone sous forme de biomasse : c’est ce qu’on appelle le carbone bleu. D’autres fixent les sédiments, limitant l’érosion des côtes ou des berges.

Bref, ce sont des ingénieurs écologiques essentiels à la vie aquatiques.
Ce qu’on appelle « plante aquatique » recouvre en fait des formes très différentes. Certaines ressemblent à des herbes souples et longues comme la zostère, avec ses feuilles rubanées de plus d’un mètre, tandis que d’autres comme les utriculaires sont si fines et discrètes qu’on les confondrait avec des brins d’algues.

Les plantes aquatiques sont bien plus que de simples « plantes dans l’eau ».
Elles incarnent des millions d’années d’adaptations et d’innovations biologiques. Mais leur lien étroit avec leurs milieux les rend extrêmement vulnérables face aux perturbations climatiques et humaines.

Merci à toutes les étudiantes et tous les étudiants qui ont contribué à cet épisode par leur rigueur et leur passion.


brown tree branch on water
brown tree branch on water
green-leaf plant and lilies
green-leaf plant and lilies

Le lotus est une plante totalement aquatique dont seules les feuilles et les fleurs sortent de la surface de l'eau.

Herbier de zostère (Olivier Dugornay CC-BY-04)

Poursuivons dans les eaux douces des alentours, cours d’eau, flaques, mares ou même dans les sols imbibés d’eau, les microalgues sont partout. On entend par microalgues des organismes constitués d’une seule cellule et ayant besoin de l’eau pour la plupart des étapes de leur cycle de vie. Chlamydomonas en particulier est une microalgue très répandue dans le monde et également très utilisée en recherche pour étudier le fonctionnement des génomes du chloroplaste en particulier mais également le fonctionnement des flagelles, ces petites queues qui leur permettent de se déplacer, comme les spermatozoïdes des animaux. Elle a également la particularité de se cloner par division cellulaire et former des sortes de kystes permettant de faire face à des conditions difficiles comme la sécheresse et d’attendre des conditions plus clémentes. Fiona PERALTA, Lisa SEBIRE, Botet Ewan et Elisa VODINH ont regardé pour nous un article de chercheurs et chercheuses qui ont analysé le comportement de cette microalgue en présence d’un prédateur, et vous allez voir que ça nous en apprend bien plus que ce qu’on pourrait imaginer. (à écouter dans l'épisode directement).

Article scientifique sur les coraux  : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/gcb.16987
Article scientifique sur les plantes carnivores des tourbières  : Jakšová J., Adamec L., Petřík I., Novák O., Šebela M., Pavlovič A., (2021). Contrasting effect of prey capture on jasmonate accumulation in two genera of aquatic carnivorous plants (Aldrovanda, Utricularia). Plant Physiology and Biochemistry 166, 459-465. https://doi.org/10.1016/j.plaphy.2021.06.014.
Article scientifique sur les posidonies : 

Litsi-Mizan V, Efthymiadis PT, Gerakaris V, Serrano O, Tsapakis M, Apostolaki ET, (2023) Decline of seagrass (Posidonia oceanica) production over two decades in the face of warming of the Eastern Mediterranean Sea. New Phytologist 239:2126–2137.https://doi.org/10.1111/nph.19084

Article scientifique sur les zoostères :

Johnson A.J. (2021). Recovery dynamics of the seagrass Zostera marina following mass mortalities from two extreme climatic events, Estuaries and Coasts, Volume 44, pages 535–544. https://doi.org/10.1007/s12237-020-00816-y

Article scientifique sur les microalgues :

Herron M.D., Borin J.M., Boswell, J.C. et al. Origines de novo de la multicellularité en réponse à la prédation. Science Report 9, 2328 (2019). https://doi.org/10.1038/s41598-019-39558-8

De nombreux écosystèmes humides contiennent principalement de l’eau douce : mares, lacs, étangs, rivières, ou encore des milieux plus spécifiques comme les tourbières. Ces zones, dispersées à travers le globe, abritent une flore parfois très spécialisées, voir endémique (que l’ont retrouve uniquement dans ces endroits).

Cette utriculaire cache bien son jeu alors que sa fleur est émergée.

Microalgue verte vue au microscope (NadvinCC-BY-04)

Aldrovendra dont on distingue les pièges

Partie immergée d'une utriculaire dont on distingue les pièges

Continuons notre voyage en méditerranée . Cette mer intérieure est quasi fermée par le détroit de gibraltare au sud de l’espagne et au nord du maroc. Cette configuration a favorisé l’endémisme, c’est à dire la présence naturelle d'un groupe biologique exclusivement dans une région géographique délimitée tels que les coralligènes, des écosystèmes caractérisés par l'abondance d'algues calcaires, dites algues coralligènes, capables, en association avec d'autres espèces animales à squelette calcaire, de construire de vastes constructions comparables aux massifs coralliens. Mais c’est également le cas des herbiers de posidonie, une plante à fleur, donc angiosperme, qui forme de vastes étendues à faibles profondeurs, appelées herbiers, un peu comme un champ de posidonie sous marin que l’on ne trouve qu’en Méditerranée. Seulement voilà, l’endémisme est souvent mis à mal quand l’environnement varie de manière trop importante changeant les conditions dans lesquelles se développent les espèces. Les posidonies par exemple sont très exposées aux activités anthropiques, au changement climatique et en font parfois les frais.

Sophie BOSSE, Ana Julia DIAS SILVA, Emma JEULAND et Paul LE GOER se sont intéressés à une étude qui a analysé l’impact du réchauffement local des eaux de la Méditerranée orientale sur les posidonies. (à écouter dans l'épisode)

Autre étude, autre source de stress pour les posidonies. Ce sont les émissions sonores anthropiques, c’est à dire d’origine humaine, qui perturbent le développement des posidonies. Un travail de recherche mis en lumière par Chloe CORREIA, Prune REBOUT, Tonie REYGROBELLET et Kenza ZITOUNI TERKI

Herbier de posidonies en Méditerranée (Frédéric Ducarme CC-BY-04)

Un peu plus loin , passé le détroit de Gibraltare, remontant les côtes atlantiques européennes, on découvre d’autres types d’herbiers ,notamment dans le bassin d'arcachon, cette fois constitués d’une autre angiosperme, la Zostère. Elles portent ce nom qui signifie “ceinture” en grec ancien car leur feuilles en ruban peuvent atteindre 120 cm de long, faisant penser à une grande ceinture. De même que les posidonies, ces plantes s’étalent sur de grandes surfaces par multiplication végétative, similaire à du bouturage. Elles aussi sensibles au réchauffement des eaux, elles adoptent d’autres stratégies de résilience que vont vous exposer Gloire Aurelsy LOUYAKO KOUYIDIKILA, Taos TAALBA et Louise TONNELE, sur la base d’une étude de 2020. (à écouter dans l'épisode directement)

On continue notre petite exploration en restant dans l’eau salée, on traverse les océans vers les récifs coralliens des eaux tropicales du Pacifique. Ici les coraux sont associés à des microalgues en symbiose, c'est-à-dire une association étroite et durable entre deux organismes d’espèces différentes qui se rendent service mutuellement. Mais vous allez découvrir que cette association peut être mise à mal par l’augmentation des températures des océans. Pour éclairer notre lanterne et découvrir comment les scientifiques tentent de protéger ces associations tant bien que mal , nous allons écouter Emma BOURGUIGNON, Nitha CHARDINE, Pauline TARBOURIECH et Laetitia MALAVAUX.

a coral reef with many different types of corals
a coral reef with many different types of corals